SEMENCES CÉRÉALES D’HIVER Le marché fait face aux difficultés de semis

Les fortes pluies de l’automne 2023 ont perturbé les implantations de céréales à paille d’hiver, notamment dans le Nord-Ouest, le Centre-Ouest et le Sud-Ouest. Si bien que certains agriculteurs ont dû se résoudre à semer des cultures de printemps. Selon les dernières statistiques d’Agreste, les surfaces de blé tendre d’hiver reculeraient de 7,5 % en 2023-2024, par rapport à la campagne précédente. Les autres céréales d’hiver sont également en retrait : blé dur (-6,3 %), orge d’hiver (-5,8 %), avoine (-4,5 %), seigle (-6,7 %) et triticale (-8,6 %). Au total, ce sont plus de 400 000 ha qui n’auront donc pas pu être implantés ! Et les autres surfaces ont parfois été semées dans des conditions difficiles, ce qui pourrait affecter le rendement final.

Les surfaces en multiplication de semences sont également touchées, notamment en blé tendre avec seulement 60 000 ha mis en place pour 2023-2024 (-7 %). Ce qui laisse craindre quelques tensions dans la disponibilité des variétés pour les prochains semis, dans certaines régions. Même chose en avoine d’hiver et en triticale. La qualité des semences pourrait être aussi pénalisée, conséquence des intempéries.

Cette situation difficile n’est pas perceptible à première vue sur les statistiques de ventes de semences certifiées. Ces dernières seraient très hétérogènes selon les régions, mais globalement stables. Le blé tendre serait légèrement en hausse tandis que l’orge d’hiver grimperait de 5 %. En revanche, les autres espèces reculeraient. Mais le fait marquant est qu’« il y a eu beaucoup de retours dans les zones où les semis n’ont pas pu se faire, explique Félicien Bullot, chez Florimond Desprez. Beaucoup de coopératives ont aussi choisi de laisser des stocks en ferme, avec des avoirs pour certains agriculteurs afin de ne pas récupérer des volumes de retour qui pouvaient aller jusqu’à 20 %. » Ces stocks pourraient pénaliser les ventes de semences pour les semis 2024. Mais « on ne sait pas dans quel état seront ces semences à l’automne », s’interroge Laurent Druesne, de RAGT Semences. La difficulté est aussi de savoir les quantités de semences que les agriculteurs ont encore en ferme. Cela n’est pas sans poser des problèmes aux niveaux industriel et logistique.

Blé tendre : Chevignon encore n° 1

Dans le classement, publié par Arvalis en juillet 2023, des variétés pures de blé tendre les plus cultivées, la première place est toujours occupée par Chevignon avec 16 % des surfaces (16,6 % la campagne précédente), suivi de KWS Extase (7,2 %) et de LG Absalon (4,8 %). Six variétés inscrites entre 2020 et 2022 font leur entrée dans le top 10 : KWS Ultim (3,9 %), Prestance (2,1 %), LG Audace (1,7 %), KWS Sphère (1,5 %), Celebrity (1,4 %) et Garfield (1,4 %). Complice complète le classement à 2,7 % des surfaces. Si les semis de variétés pures en blé tendre représentent encore 79,2 % de la sole emblavée, la part des mélanges de variétés progresse à nouveau de deux points par rapport à 2022, à 19,5 %, soit devant Chevignon.

Florimond Desprez a profité de la bonne génétique de Prestance et Celebrity pour devenir leader du marché, avec 21 % de parts de marché (PDM) pour les hectares multipliés en 2023-2024. Saaten Union annonce 17-18 % de PDM (lignées et hybrides), avec notamment sa variété Chevignon. Tandis que KWS Momont perd 2 points à 15 %, du fait de la forte baisse de deux variétés phares, KWS Extase et KWS Ultim. La première devrait encore rester la cinquième variété du marché en 2024, et la deuxième demeurer dans le top 15. RAGT Semences arrive en quatrième position avec 12 %. Les autres semenciers ont des places plus modestes en blé tendre : Syngenta Seeds (6 %), Secobra Recherches (5 %), Agri Obtentions (4 % au global, 25-30 % sur les blés améliorants), LG (4 %), Caussade semences pro (4 %), Lemaire Deffontaines, DSV et Unisigma. Semences de France est le premier acteur de commercialisation sur le circuit long. Ses variétés Préférées de blé tendre représentent 60 à 70 % des surfaces de multiplication de nouveautés semées pour la récolte 2024.

Orge : Momont et Secobra en tête

En orge d’hiver, KWS Momont reste leader grâce à KWS Faro, qui représente près de 30 % du marché global (hors hybride), pour la récolte 2023. C’est la première du top 10 devant LG Zebra (8,3 %) et KWS Joyau (5,4 %). Dementiel, LG Caiman et Idilic entrent dans le classement avec respectivement 4,7 %, 2,8 % et 2,3 % du marché. Secobra Recherches se place en deuxième position des obtenteurs, avec 25 % du marché au total. Sa variété Etincel fait toujours partie du top 10 (3,5 %). Les orges de type hiver représentent 65 % des surfaces totales d’orge, en progression de 1 point par rapport à 2022. Elles sont majoritairement de type 6 rangs, à 81 % contre 19 % pour les orges d’hiver à 2 rangs. Les orges d’hiver hybrides représentaient 77 000 ha en 2023, soit une progression de 4-5 % par rapport à 2022.

Blé dur : Anvergur domine encore

En blé dur, la variété Anvergur conserve sa première place, avec 52,3 % de la sole française pour la récolte 2023. Elle est suivie par RGT Voilur (13,5 %). Les variétés RGT Soissur et Santur font leur entrée dans le top 10, respectivement aux 8^e et 9^e places. Les mélanges variétaux représentent 6,3 % (+ 1,9 point par rapport à 2022). RAGT Semences domine ce marché (80 à 85 % des ventes). Florimond Desprez annonce 14 % de surfaces multipliées, avec Rocaillou, variété en plein développement (10 % du marché). Du côté du triticale, les mélanges de variétés représentent 26 % (+ 1 point par rapport à 2022). RGT Omeac occupe toujours la tête du classement, avec 12,3 % des surfaces, suivie de Brehat (8,2 %) et Lumaco (6,5 %). Les variétés RGT Gwendalac, RGT Rutenac et Ruche font leur entrée dans le top 10. RAGT Semences, Florimond Desprez, Agri Obtentions et Lemaire Deffontaines sont les principaux acteurs du marché.